Digital Services Act : l’Europe souhaite-t-elle des citoyens muets et obéissants

L’Union Européenne se structure, et à travers le Digital Services Act, elle fait des propositions qui visent la responsabilité des plateformes numériques au regard des risques importants, qu’elles induisent pour leurs utilisateurs, dans la diffusion de produits illicites, de contenus dangereux ou parfois contrefaits.

Digital Services Act : C’est quoi


Digital Services Act : l’Europe souhaite-t-elle des citoyens muets et obéissants; L’Union Européenne lance le Digital Sercices Act. Il s’agit d’une loi sur les services numériques proposée par l’UE en décembre 2021 et adoptée par le Parlement européen le 20 janvier dernier.
Avec des règles inédites qui permettront de mettre les plateformes numériques face à leurs responsabilités en matière de diffusion des contenus et des produits, ce texte législatif marquera certainement une étape importante dans la manière dont les géants de l’Internet sont réglementés. Il offrira également une plus grande sécurité aux utilisateurs.
Toutefois, s’il est acclamé par certains, le Digital Sercices Act est également très critiqué, et pas seulement par les géants de l’Internet qui sont les premiers concernés par les nouvelles règles qu’il impose. Certains acteurs reprochent à la Commission et aux députés européens d’avoir introduit subtilement des articles qui vont donner aux autorités européens de pouvoir étendre progressivement leur mainmise sur Internet.
Digital Services Act : l’Europe souhaite-t-elle des citoyens muets et obéissants ? Découvrez dans cet article tout ce qu’il y a à savoir sur cette nouvelle loi sur les services numériques ainsi que sur les petits détails passés inaperçus que seuls ceux contre cette loi ont pu remarquer.

Un accord sur le Digital Services Act enfin trouvé


Le 22 avril dernier, après 16 heures de négociations, le Parlement européen, les Etats membres de l’UE ainsi que la Commission européenne se sont enfin mis d’accord sur le Digital Services Act. Pour rappel, l’adoption de cette loi par le Parlement date déjà du 20 janvier dernier.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen fait partie des premières personnes à avoir annoncé la nouvelle publiquement sur les réseaux sociaux. Elle a déclaré sur son compte twitter que cet accord, qu’elle qualifie d’historique, ajoute de nouvelles règles qui permettront de protéger les utilisateurs en ligne et également garantir la liberté d’expression sur Internet.
Dans le tweet, elle a également ajouté que dans les grandes lignes, l’objet du DSA est tout simplement de rendre illégal en ligne toutes les choses qui l’étaient déjà hors ligne dans l’UE.
Amnesty International fait aussi partie des organisations à avoir célébré l’adoption de cette nouvelle loi. Et au même titre que la Commission européenne, elle la qualifie aussi « d’étape importante dans l’histoire de la régulation d’Internet ».

Que sont les services numériques d’abord ?


Les services numériques sont un terme qui fait référence au transfert électronique d’informations, y compris des données et du contenu, sur de nombreuses plates-formes et appareils tels que le Web ou le mobile.
Des exemples de services numériques incluent les jeux vidéo, les logiciels basés sur le cloud, les sites Web, la musique en streaming, le stockage de données en nuage, les plateformes e-commerce et bien évidemment les réseaux sociaux qui jouent un rôle important dans nos vies
Le Digital Services Act vise à responsabiliser les entreprises qui gèrent ces services, en particulier ceux qui ont une taille assez importante tels que les géants de la Techn comme Meta, Google, Twitter, YouTube, Spotify, Airbnb… Il encadre les entreprises européennes ainsi que les entreprises basées en dehors de l’UE set qui fournissent des services dans le marché européen.

Que contient le Digital Services Act ?


L’idée de base derrière le Digital Services Act est de mettre fin aux zones de non-droit et aux abus sur Internet. Avec ce cadre législatif, les autorités européennes peuvent donc désormais s’attaquer à des activités en ligne illégales ou dangereuses comme les ventes de produits contrefaits, la propagation des discours de haine, les cybermenaces, la limitation de la concurrence, la domination du marché…. Les plateformes qui enfreindront les règles feront face à des sanctions.
Avec ses 74 articles, le DSA énonce un nombre important de règles auxquelles doivent se soumettre les entreprises qui proposent des services numériques. Parmi ces nombreuses règles, voici les plus marquantes :

  • Les plateformes web doivent supprimer tout contenu signalé par les autorités judiciaires ou administratives comme enfreignant les réglementations nationales et européennes.

  • Il est demandé aux plateformes de suspendre les utilisateurs qui ne respectent pas la loi.

  • Les géants de l’Internet comme Google, Facebook Twitter et autres devront dorénavant fournir régulièrement des rapports clairs sur la modération de leurs contenus.

  • Dorénavant, l’utilisation de données trop personnelles comme la sexualité ou les opinions politiques à des fins de ciblage publicitaire est interdite.

  • Les géants du Web sont également tenus de faire preuve de transparence sur le fonctionnement des algorithmes de recommandation et aussi d’expliquer aux utilisateurs comment leurs données seront utilisées.

  • Les plateformes numériques sont interdites de faire du dark pattern et doivent aussi s’assurer que leurs utilisateurs ne le fassent pas aussi. Le dark pattern, à titre d’information, est une interface (des publicités ou des messages intempestifs) qui a été spécialement conçue pour tromper ou manipuler un utilisateur.

  • Pour lutter contre les contrefaçons, les plateformes de commerce en ligne sont tenues de bien contrôler l’identité de leurs utilisateurs et de leurs fournisseurs ainsi que des produits que ces derniers proposent.


Comment cela affectera-t-il les utilisateurs ?


Il est désormais possible pour les utilisateurs de signaler aux plateformes en ligne les contenus illicites et les fausses informations. Si un signalement n’implique pas systématiquement la suppression du contenu signalé, les plateformes sont néanmoins tenues de notifier aux utilisateurs les actions qu’elles vont entreprendre.
Digital Services Act visera donc à instaurer un Internet plus sûr pour les internautes. Par ailleurs, il s’assure aussi que les internautes aillent leur mot à dire malgré la toute-puissance de certaines plateformes en ligne. Ainsi, il sera par exemple possible à partir de maintenant aux utilisateurs de contacter les sociétés de médias sociaux au cas où leur compte ont été bloqués.

Quelles conséquences pour la Big Tech ?


Le Digital Services Act lutte pour la désinformation, les Fake News, la concurrence déloyale, les ventes de produits illégaux et de contrefaçon, la vente de produits dangereux, la violation des droits d’auteur, la pornographie, le revenge porn (se venger d’une personne en rendant publics des contenus pornographiques), la propagation de discours de haine, les cybermenaces, les arnaques, le partage d’images privées non consenti, l’apologie du terrorisme, le dark patterns…  Donc, toutes les plateformes, sans distinction, commettant ces infractions subiront des sanctions de la part des autorités européennes.
Cela dit, au regard de cette loi, il est néanmoins important de souligner que toutes les plateformes en ligne ne sont pas égales. En effet, les règles seront plus strictes pour les plateformes dites très larges, ayant plus de 45 millions d’utilisateurs actifs par mois. C’est le cas notamment des géants de la Tech comme Facebook, Twitter, Amazon, Instagram, YouTube, TikTok… À la différence des autres plateformes, ils devront assurer une modération extrêmement minutieuse de leurs services.
Les plateformes en ligne possédant moins de 45 millions d’utilisateurs actifs par mois se verront quant à eux exemptées de certaines obligations induites par le DSA.

Les sanctions en cas d’infraction au DSA ?


En cas d’infraction alléguée au DSA, les utilisateurs des services pourront eux-mêmes déposer plainte contre un fournisseur de services numériques et demander un redressement en cas de dégâts ou de pertes.
Si une entreprise quelconque enfreigne les règles établies par le DSA, les régulateurs lui infligeront une amende pouvant aller jusqu’à 6% de son chiffre d’affaires mondial.
En guise d’exemple, une plateforme comme Facebook, qui en 2021 a généré un chiffre d’affaires de plus de 117 milliards de dollars, pourrait donc recevoir une amende de 7 milliards de dollars pour une seule infraction commise.
Pour ceux qui ne l’auront pas remarqué, les amendes pour le DSA sont plus importantes que celles du RGPD (Règlement général sur la protection des données), une loi qui responsabilise les organismes publics et privés qui traitent leurs données.
Pour les infractions graves, surtout s’il y a eu récidive, les entreprises peuvent même être directement bannies complètement de l’Union européenne.

DSA,  des « mesures spéciales » pour contrer la désinformation en cas de crise


La Covid-19 ou encore la guerre en Ukraine nous aura appris que la désinformation peut être une arme au service de la manipulation de l’opinion. Elle peut cacher ou déformer des faits, brouiller les sens du public, empêcher la distinction entre le vrai et le faux ou encore parasiter la relation de confiance tissée entre un dirigeant, ses partenaires et ses concitoyens. Et malheureusement, Internet est aujourd’hui le principal vecteur de désinformation dans le monde. Et qui dit Internet dit forcement grandes plateformes en ligne, telles que Facebook, Twitter, Instagram, Tik Tok et pleines d’autres encore.
Pour lutter contre la désinformation sur Internet dans les zones de crise et de conflit, l’Union européenne décidera de « mesures spéciales proportionnées » à appliquer à ces plateformes, dont la nature n’a pas encore été précisée pour l’instant.

Le Digital Services Act peut-il faire entrave à la liberté d’expression sur Internet ?


Tout le monde ne voit pas d’un très bon œil le Digital Services Act. Pour certains en effet, il pourrait faire entrave à la liberté d’expression sur Internet.
Déjà expliqué plus haut, le Digital Services Act établit une série de principes et d’obligations que les plateformes numériques vont devoir suivre scrupuleusement au risque de recevoir des sanctions. En cas d’infractions graves, elles peuvent même être bannies de l’Union européenne.
À l’avenir, on peut donc craindre que le Digital Service Act s’attaquera aux plateformes qui présenteront des informations dites alternatives ou bien farfelues, ce qui est quand une même déjà une forme d’entrave à la liberté d’expression sur Internet.
Il est aussi clair qu’en offrant à certains acteurs la pouvoir d’intervenir sur la modération des contenus sur les plateformes, le Digital Services Act ira jusqu’à imposer la présence de certains contenus jugés conformes par les autorités.

Conclusion sur les règlements de l’Union Européenne




La commission Européenne a présenté ses deux propositions de règlement pour réguler le marché du numérique en ligne, qui seront le DSA et le DMA


  • DSA = Digital Service Act

  • DMA = Digital Market Act


En réalité, l’Union Européenne cherche à mettre des règles et un cadre réglementaire, qui finira par peser sur les géants du numérique, pour proposer aux internautes un marché plus juste.




Cocorico – L’adoption du DMA et du DAS fait partie des dossiers brûlants de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, qui doit prendre fin le 30 juin


Pour en savoir plus, informations sur le site officiel du Sénat :







Auteur Antonio Rodriguez, Editeur et Directeur de Clever Technologies